Québec (Québec), 1914 – Montréal (Québec), 1988
Compositeur

Maurice Blackburn fait ses études musicales (piano, orgue, composition, improvisation, harmonie, contrepoint) à l’Université Laval (1937-39) et parallèlement avec Claude Champagne et Georges-Émile Tanguay. Boursier du Gouvernement du Québec, il étudie ensuite au New England Conservatory de Boston (1939-41) avec Quincy Porter et Francis Findlay et suit en 1940 les conférences de Stravinski à l’Université Harvard. En 1941, à la demande de l’Office national du film du Canada (ONF), il écrit sa première musique de film, Maple Sugar Time.

Une longue carrière (1942-1983) de compositeur de cinéma s’ouvre alors à lui à Ottawa, puis à Montréal après le déménagement de l’ONF en 1956.

La période de 1942 à 48 est consacrée à la découverte du médium. Blackburn compose ou harmonise alors la musique d’une trentaine de documentaires. Dans le sillage du compositeur belge Arthur Hoérée, il perfectionne la technique du son sur pellicule avec Norman McLaren, dont les premières expériences en ce domaine remontent à 1933.

Les années 1949 à 64 marquent l’affirmation de son écriture pour le genre documentaire. Il travaille sur plus de quarante films aux sujets aussi variés que l’urbanisme, la chasse et la musique.

Son œuvre la plus remarquable de cette période est pourtant sa collaboration au film de McLaren Blinkity Blank (1955), lauréat de treize prix dont la Palme d’or au Festival international de Cannes. C’est au cours des années 1950 qu’il exerce son métier d’artisan-luthier pour mettre en musique les sons qu’il entend reproduire.

Durant les années 60, il aborde le long métrage de fiction. Il participe à la musique de À tout prendre de Claude Jutra en 1963, un des premiers films indépendants au Québec. En 1965, il compose la musique du premier long métrage de fiction produit par l’ONF, Le Festin des morts. Lors de l’Exposition universelle de 1967 à Montréal, il écrit la musique pour un film du Pavillon du Québec et celle d’un diaporama, Six formes musicales audiovisuelles, pour le pavillon L’Homme et la musique des Jeunesses musicales Canada. En 1969, il réalise son film d’animation Ciné-crime. Toujours dans les années 60, il s’impose comme monteur, organisant la trame sonore à la manière de la musique concrète, notamment pour Je (1960) et Jour après jour (1962). En 1971, il participe à la création de l’Atelier de conception et de réalisations sonores au studio français d’animation de l’ONF. Depuis lors, jusqu’à sa retraite au début de 1980, il compose la trame sonore de plus de vingt films d’animation, de onze documentaires et de quatre longs métrages de fiction. Narcisse de McLaren est son dernier film. Comme chef d’orchestre, il dirige ses propres œuvres et celles d’autres compositeurs de l’ONF. En 1985, l’Association des compositeurs, auteurs et éditeurs du Canada (CAPAC) (maintenant la SOCAN, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) avait répertorié 414 titres de films dont la musique originale était signée Maurice Blackburn, seul (environ 200) ou avec des collaborateurs. Si l’on compte les repiquages d’extraits de musique de «stock», on peut retrouver la musique de Blackburn dans près de 1000 films.

En même temps qu’il poursuit sa carrière à l’ONF, ses œuvres symphoniques et lyriques sont jouées en concert: Charpente à Montréal (1944-48), Prague et Londres (1946); Ouverture pour un spectacle de marionnettes à Montréal (1951); Pirouette et Une mesure de silence en tournée pour les Jeunesses musicales Canada (1960-61). ll bénéficie de deux séjours comme boursier à Paris: le premier (1946-48) lui permet d’étudier avec Nadia Boulanger, le second (1954 à 55) de fréquenter notamment le Groupe de recherche de musique concrète (GRMC) dirigé par Pierre Schaeffer à la Radiodiffusion-télévision française (RTF) (maintenant l’Office de radiodiffusion-télévision française, ORTF), tout en poursuivant ses travaux de composition. L’UNESCO l’invite à participer à un congrès des compositeurs de musique de films à Cannes (1954). En 1983, le Gouvernement du Québec lui décerne le Prix Albert-Tessier pour l’ensemble de son œuvre. Le quotidien La Presse met alors à la une sa déclaration que «le film dégage sa propre musique». En 1989, lors du 50e anniversaire de fondation de l’ONF, un hommage posthume lui est rendu. Il conserve son statut de Compositeur agréé du Centre de musique canadienne (CMC).

Louise Cloutier, tiré du livret du disque Filmusique-Filmopéra (Analekta, AN 7005/06) [xii-96]