Pour cette 5e Série hommage de la SMCQ, faisant suite depuis 2003 à celles consacrées à Claude Vivier, Gilles Tremblay, Ana Sokolović et Denis Gougeon, le choix de John Rea s’est naturellement imposé comme «incontournable», étant donné la stature impressionnante et les réalisations tout à fait remarquables du compositeur-pédagogue.
Fasciné par les paradoxes visuels (trompe-l’oeil) présents dans la production — entre autres — du dessinateur, illustrateur, muraliste et concepteur de tapisserie Maurits Cornelis Escher et du plasticien hongrois Victor Vasarely, John Rea a transposé dans plusieurs de ses œuvres certains aspects picturaux liés à la projection dans le temps d’une «géométrie» sonore, sans toutefois négliger pour autant une autre approche — fondamentale, de nature «expressive» — associée à la mise en valeur de trames narratives, où un texte, un argument ou un titre évocateur orientent l’attention de l’auditeur vers un agencement d’images de source «extramusicale».
Ces deux pôles apparemment incompatibles (paradoxaux), c’est-à-dire la géométrie structurelle musicale, abstraite, mathématique, objective, versus l’expression subjective d’émotions, de sentiments et/ou d’autres «états d’âme» difficiles, sinon impossibles, à quantifier, sont constamment présents dans l’ensemble de son œuvre et en constituent finalement le moteur, la raison d’être.
Cette dynamique d’allers-retours entre des éléments antinomiques (le cœur et la raison) est exactement au centre des préoccupations (oserions-nous dire des obsessions) du compositeur, dans sa recherche d’un équilibre absolu entre la forme et le contenu, et contribue largement au profil unique de sa musique, dont l’originalité et la puissance expressive — contenue — sont palpables à tout moment!
La démarche esthétique de John Rea représente à juste titre une forme de réincarnation «contemporaine» du rêve de la Renaissance, en ce sens que contrairement à la soi-disant perfection formelle Classique (au détriment de l’expression individuelle) et aux excès du Romantisme débridé où le «Moi» est omniprésent, sa musique cherche constamment à concilier ces deux tendances et par le fait même à atteindre un équilibre qui n’est pas sans rappeler — à sa manière — celui que l’on trouve chez un Jean-Sébastien Bach.
C’est donc dans une atmosphère de fébrilité que la SMCQ — ainsi que tous ses nombreux partenaires et collaborateurs — vous proposent une singulière «Odyssée» dans l’imaginaire unique et captivant de John Rea pour cette Série hommage 2015-2016! Au plaisir de vous y rencontrer en grand nombre!
— Walter Boudreau, Aïda Aoun, Directeur artistique et Directrice générale